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Ecole Francaise vers 1790 Atelier d Elisabeth Vigee Le Brun (1755-1842)

Portrait de Marie Caroline d'Autriche, reine de Naples (1752-1814)

etiquette philippe guegan vase.jpg

Huile sur panneau : 36 x 27 cm

Cadre en bois sculpté et doré d'époque Louis XVI : 48 x 39,8 cm


Parmi les nombreux portraits de la reine de Naples, celui peint par Madame Vigée Lebrun est sans aucun doute le plus beau. Effigie royale et splendide, notre tableau est une répétition en petit format, un « recordo », du portrait, peint à Naples en 1791, par Elisabeth Vigée le Brun. 

Notre panneau se distingue des portraits de la reine de Naples exécutés d’après Madame Le Brun, car il appartient à un petit corpus, de quelques tableaux de même format et de très belle qualité, un ensemble de réductions d’un format identique au nôtre, vraisemblablement exécutées pour l’entourage de la reine, pour sa famille et pour ses enfants, car plusieurs se sont transmises dans la descendance du modèle :


- Le musée Condé à Chantilly conserve un premier portrait de dimensions similaires, une huile sur toile, qui provient des collections d’une fille de la reine, dont il porte les marques d’inventaire, la princesse Marie-Amelie de Bourbon Sicile, duchesse d’Orléans, puis reine des Français (1782-1866)[1].

- Une deuxième version identique à la nôtre, de même dimension et peinte sur panneau est conservée au musée du Prado à Madrid. Elle fut probablement adressée par la reine au roi d’Espagne Carlos IV, frère ainé du roi de Naples, en même temps qu’une réduction du portrait de la princesse Maria Cristina (1779-1849)

- Une troisième version, également identique à la nôtre : de même dimension et également peinte sur panneau, provient de la princesse Maria Cristina de Bourbon, duchesse de Genova, puis reine de Sardaigne (1779-1849), dont elle porte les marques d’inventaire, fut vendue à Munich en 2014[2].

- Une quatrième version, également identique à la nôtre, de même dimension et également peinte sur panneau, figurait dans la collection du prince Al-Thani à l’hôtel Lambert[3].


Notre panneau, très finement exécuté, est donc, à notre connaissance, le cinquième exemplaire identifié de ces recordos du portrait de la reine de Naples.


Le musée Condé, le musée du Prado conservent d’autres réductions des portraits peints à Naples par Madame Vigée Le Brun. Joseph Baillio signale également une autre réplique de petit format, peinte sur panneau, d’un portrait « napolitain » de Madame Vigée Le Brun, celui du prince royal François, qui figurait dans la vente de la collection de la princesse de Faucigny Lucinge en 1924[4].



L’archiduchesse Marie Caroline de Habsbourg Lorraine nait le 13 aout 1752 à Schönbrunn, treizième enfant de François Ier de Lorraine, empereur du Saint Empire et de l’impératrice Marie Thérèse d’Autriche reine de Bohème et de Hongrie. Mariée en 1768 avec le roi de Naples Ferdinand IV[5], elle est la sœur ainée de la reine de France Marie-Antoinette et est l’auteur d’une très importante descendance - quarante-six petits enfants - dans les maisons d’Autriche, de Bourbon-Siciles, et d’Orléans. Elle est notamment la grand-mère de l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche (1791-1847), seconde épouse de Napoléon, puis duchesse de Parme et de la princesse Marie-Caroline de Bourbon Siciles (1798-1870), la célèbre duchesse de Berry.

Personnage controversé de l’Histoire, la reine de Naples fut beaucoup calomniée. Elle avait prit un ascendant politique sur son mari, fut une farouche ennemie de la Révolution, osa s’opposer à son beau-père Charles III d’Espagne, à Napoléon, et fut contrainte à de nombreux exils, notamment quand Naples fut occupé par les Français à partir de 1806. Elle mourut à Vienne en 1814, à la veille du congrès qui devait restaurer son époux sur le trône des Deux Siciles.


Quand elle peint ce portrait de la reine de Naples, Madame Le Brun, portraitiste attitrée de la reine Marie Antoinette, avait fui la France et la Révolution, et entamait un long voyage d’exil à travers l’Europe, qui devait la conduire jusqu’en Russie. Après un premier séjour de huit mois à Rome, elle s’était établie à Naples au printemps 1790, où par l’intermédiaire du baron de Talleyrand[6], ambassadeur de France, la reine de Naples lui commanda les portraits de ses enfants : deux de ses filles à marier, les princesses Marie Thérèse[7] et Louise[8], mais également le prince royal François[9] et la jeune princesse Marie Christine[10]. Madame Vigée Le Brun accepta de venir une nouvelle fois à Naples au printemps 1791, pour peindre ce portait officiel de la reine.


« Sitôt que j'avais été de retour à Naples, j'avais commencé le portrait de la reine […] il faisait alors si cruellement chaud, qu'un jour qu'elle me donnait séance, nous nous endormîmes toutes deux. Je prenais plaisir à faire ce portrait. La reine de Naples, sans être aussi jolie que sa sœur cadette, la reine de France, me la rappelait beaucoup ; son visage était fatigué, mais l'on pouvait encore juger qu'elle avait été belle ; ses mains et ses bras surtout étaient la perfection pour la forme et pour le ton de la couleur des chairs. Cette princesse, dont on a dit et écrit tant de mal, était d'un naturel affectueux et très simple dans son intérieur ; sa générosité était vraiment royale. »


Le grand portrait peint à Naples n’existe plus. Sorti des collections napolitaines, il avait été offert par la reine au cardinal di Ruffo[11] et fut malheureusement détruit dans un incendie aux États Unis en 1940[12]. Il ne nous est plus connu que par une photo noir et blanc et des répétions telles que la nôtre, qui nous permettent d’en apprécier la polychromie.


La composition peut se lire comme un hommage à la reine de France retenue prisonnière aux Tuileries après l’échec terrible de la fuite à Varennes de juin 1791, car ce tableau fait écho, dans un cadrage plus serré, au beau portrait de Marie Antoinette à la robe de velours bleu, peint quelques années auparavant en 1788[13]. Dans ce portrait de la reine de Naples, Vigée Le Brun souligne le lien de parenté des deux reines, non seulement par la ressemblance physique du modèle avec sa cadette la reine de France, mais elle compose le tableau selon « un habillement répété » dont elle modifie les coloris. Même pose assise un livre dans la main droite et le bras gauche appuyé sur un coussin, même robe de velours bleu, prise à la taille sur jupe de satin rouge pour la reine de Naples et satin blanc pour sa sœur la reine de France, même coiffure bouffante, toque de satin et de gaze empanachée de plumes d’autruche assorties, même parure de perles, même décor palatial faisant apparaitre une colonne sur la gauche.

Le portrait de Marie Antoinette de 1788 avait lui-même des précédents dans la peinture de Jean Marc Nattier, comme le portait de Madame Adélaïde en robe de velours bleu tenant une partition (1758) ou le portrait de la reine Marie Leczynska lisant la bible (1748), tableaux que Madame Vigée Le Brun connaissait bien et dans lesquels elle puise certaines formules.




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[1] HST 35 x 28 cm. Leg Aumale, inventaire n°PE403 (porte au dos une marque d’inventaire de la princesse Marie Amélie duchesse d’Orléans « A S.A.Rle. MA (monogramme surmonté d'une couronne) 104 »)

[2]Neumeister, München, 24 septembre 2014, lot n°1087 (avec une étiquette d’inventaire Casa di S.A.R. il Duca di Genova n°117). HSP 36,3 x 27,3 cm.

[3]Sotheby’s, Paris, 13 octobre 2022, Hôtel Lambert, une collection princière, volume III, lot n°623 (ancienne collection Aveline - Jean Marie Rossi). HSP 38,5 x 27 cm.

[4] Vente à Paris, 17 et 18 novembre 1924. Voir J. Baillio, Elisabeth Louise Vigée-Lebrun 1755-1842, exhibition catalogue, Seattle 1982, p. 91-92, under cat. N° 32

[5] Ferdinand de Bourbon (1751-1825) qui règne ensuite sous le nom de Ferdinand Ier des Deux Siciles de 1816 à 1825

[6] Louis Marie de Talleyrand-Périgord (1738-1809)

[7] Marie Thérèse de Bourbon (1772-1807), épouse en 1790 de François II empereur d’Autriche

[8]Louise de Bourbon (1773-1802), épouse en 1790 de l’archiduc Ferdinand III d’Autriche, futur grand-duc de Toscane

[9]François de Bourbon, duc de Calabre, puis roi des Deux Siciles (1777-1830), père, notamment de la duchesse de Berry (1798-1870)

[10]Marie Christine de Bourbon (1779-1849), épouse en 1807 de Charles Felix de Savoie, duc de Genevois puis roi de Sardaigne

[11] Le portrait original de Madame Le Brun fut offert par la reine au cardinal Fabrizio Ruffo (1744-1827), commandant de l’Esercito Sanfedista (Armée de la Sainte Foi, pour la reconquête du royaume de Naples qui combattit les révolutionnaires français et obtint en 1799 avec le soutien des Anglais, des Autrichien et des Turcs, la chute de la république parthénopéenne). Le tableau passa ensuite aux Ruffo di Calabria, puis au docteur Luigi Maiello.

[12] J. Baillio, Elisabeth Louise Vigée-Lebrun 1755-1842, exhibition catalogue, Seattle 1982, p. 91-92, under cat. N° 32. Le portrait de la reine de Naples était alors dans la collection du docteur Luigi Maiello, spécialiste des rayons X originaire de Naples et installé à Providence aux USA. Le tableau fut détruit dans l’incendie de sa maison.

[13] HST 1788, Château de Versailles et de Trianon, inv. MV2097

Portrait of Marie Caroline of Austria, Queen of Naples and Sicily (1752-1814)

Oil on panel: 36 x 27 cm  

In a Louis XVI carved and gilded wooden frame


Among the numerous portraits of the Queen of Naples, the one painted by Madame Vigée Le Brun is undoubtedly the most beautiful. A royal and splendid effigy, our painting is a small-format repetition, a "recordo," of the portrait painted in Naples in 1791 by Elisabeth Vigée Le Brun, and belongs to a small corpus of paintings of the same format and very fine quality, a set of reductions in a format identical to ours, probably executed for the queen's entourage, for her family and for her children, as several were passed down through the model's descendants:


- The Musée Condé in Chantilly houses a similar portrait of the same dimensions, originating from the collections of one of the queen’s daughters, Princess Marie-Amélie of Bourbon Sicily, Duchess of Orléans, and later Queen of the French (1782-1866).  

- A second version identical to ours, of the same size and painted on panel, is housed at the Prado Museum in Madrid. It was probably sent by the Queen to King Carlos IV of Spain, the elder brother of the King of Naples, along with a reduction of the portrait of Princess Maria Cristina (1779-1849).

- A third version, identical to ours in size and also painted on a panel, came from another daughter of the queen, Princess Maria Cristina of Bourbon, Duchess of Genoa, later Queen of Sardinia (1779-1849), and was sold in Munich in 2014.  

- A fourth version, also identical to ours in size and painted on a panel, was part of Prince Al-Thani’s collection at the Hôtel Lambert.  


Our portrait, finely executed on a panel, is therefore the fifth known example of these "recordos" of the Naples painting. Joseph Baillio mentions another small-format replica on panel of a "Neapolitan" portrait by Madame Vigée Le Brun, that of Prince Royal François, which was part of the sale of Princess de Faucigny Lucinge's collection in 1924.




Archduchess Marie Caroline of Habsburg Lorraine was born on August 13, 1752, in Schönbrunn, the thirteenth child of Francis I of Lorraine, Holy Roman Emperor, and Empress Maria Theresa of Austria, Queen of Bohemia and Hungary. She married King Ferdinand IV of Naples in 1768. Marie Caroline was the elder sister of Marie Antoinette, Queen of France, and had a significant lineage within the royal houses of Bourbon Sicily, Austria, and Orléans.


A controversial historical figure, Marie Caroline was much maligned. She did not confine herself to her role as queen consort but exerted political influence over her husband. A fierce opponent of the Revolution, she dared to defy her father-in-law Charles III of Spain and Napoleon. She endured multiple exiles and died in Vienna just before the Congress that would restore her husband to the throne of the Two Sicilies.



Marie Antoinette’s favored portraitist had fled France and the Revolution, embarking on a long exile across Europe, which would eventually take her to Russia. After an initial eight-month stay in Rome, she settled in Naples in the spring of 1790, where, through Baron de Talleyrand, the French ambassador, the Queen of Naples commissioned portraits of her children: two of her daughters to be married, Princesses Marie Thérèse and Louise, as well as Prince Royal François and young Princess Marie Christine. Madame Vigée Le Brun returned to Naples in the winter of 1791 to paint this official portrait of the queen.


Unfortunately, this painting no longer exists, having been destroyed in a fire in 1940. It is now only known through a black-and-white photograph and through paintings like ours, which allow us to appreciate its colors. The composition can be seen as a tribute to the Queen of France, who was imprisoned in the Tuileries after the failed escape to Varennes. This painting echoes, with a tighter framing, the very regal portrait of Marie Antoinette in a blue velvet dress, painted a few years earlier in 1788. In this portrait of the Queen of Naples, Vigée Le Brun highlights the familial connection between the two queens, not only by the resemblance of the sitter to her younger sister, but by composing the painting with a "repeated attire" while changing the colors. The same seated pose, holding a book in her right hand and resting her left arm on a cushion, is present. The Queen of Naples wears a blue velvet gown cinched at the waist over a red satin skirt, while her sister, the Queen of France, wore white satin. Both have similar hairstyles, satin and gauze turbans adorned with matching ostrich feathers, the same pearl jewelry, and a palatial backdrop featuring a column on the left.


The 1788 portrait of Marie Antoinette itself had precedents in Jean-Marc Nattier's paintings, such as his portrait of Madame Adélaïde in a blue velvet gown holding a musical score (1758) or his portrait of Queen Marie Leczynska reading the Bible (1748), works that Vigée Le Brun knew well and from which she drew inspiration.



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